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    Lutte d’influence au FMI

    Washington veut éroder l’influence des États européens

     

    La tâche du FMI est d’empêcher ou, du moins, de limiter l’effet des crises financières qui affectent les États et qui pourraient avoir des répercussions sur l’économie mondiale. Les esprits critiques nous disent que ce système fait tomber les gouvernements et les banques dans la tentation de faire des affaires risquées car, de fait, le FMI, en cas d’échec, vole à leur secours. Le FMI est alimenté par des cotisations payées par les grands États industrialisés. Les États-Unis sont l’État qui, en réalité, profite pleinement de l’institution qu’est le FMI, parce que Washington use de son influence prépondérante pour dire quels États doivent recevoir une aide et quels États doivent en être privés, et sous quelles conditions.

    La place prépondérante qu’occupent les États-Unis au sein du FMI provient du simple fait qu’ils sont le seul État membre disposant d’une minorité de blocage. Lorsque des décisions importantes doivent être prises, une majorité de 85% s’avère nécessaire. De cette façon, rien ne peut s’opposer à la volonté des Américains qui disposent de 16,74% des voix. Dans le « groupe des cinq grands », dont certains s’opposent parfois aux États-Unis, il faut compter le Japon (6,01%), l’Allemagne (5,87%), la France (4,85%) et la Grande-Bretagne (4,85%). Les « cinq grands » disposent donc d’une masse de voix équivalant à 38,32%. Tous les autres États, qui se sont généralement rassemblés au sein de groupes afin de pouvoir fédérer leurs voix, disposent tous ensemble de 61,68%.

    Récemment les États-Unis ont une nouvelle fois fait étalage de leur puissante musculature. Il s’agit, en l’occurrence, d’occuper les sièges du directoire exécutif, responsable du fonctionnement au quotidien du FMI. D’après les statuts du FMI, ce directoire exécutif prévoit 20 sièges. Avec une majorité de voix de 85%, ce nombre de sièges pourrait être augmenté. On a fait usage de cette possibilité après les adhésions de la Chine, de l’Arabie Saoudite et, en 1992, de la Suisse. Le nombre de membres du directoire exécutif est désormais de 24. C’est surtout la Suisse qui a insisté pour que cet élargissement devienne réalité et a obtenu, dès son adhésion, un siège au sein de ce directoire.

    L’élargissement du directoire exécutif est confirmé depuis lors tous les 2 ans par résolution. Lors du dernier vote, cependant, les États-Unis ont refusé, en faisant usage de leur minorité de blocage, qu’une telle résolution soit une nouvelle fois entérinée. La raison de ce refus ? Les États-Unis cherchent à amoindrir l’influence des États de l’UE au sein du FMI. Ils voudraient que 5% des droits de vote passent des pays industriels aux pays dits « émergents ». Les États-Unis veulent également donner plus de poids aux pays émergents dans le directoire exécutif, tout en réduisant le nombre de sièges en son sein. Pour y parvenir, Washington exerce une pression sur les États de l’UE pour qu’ils consentent à céder une partie de leurs 7 sièges permanents au sein du directoire exécutif.

    Si aucun règlement à l’amiable ne survient avant la fin octobre 2010, alors le directoire comptera à nouveau 20 sièges comme auparavant et les membres du directoire issus des groupes de pays plus petits perdront automatiquement leurs sièges. Il s’agirait des  groupes téléguidés par des pays comme le Brésil, l’Inde, l’Argentine et le Rwanda. Le Brésil et l’Inde surtout n’admettront pas ce recul ni l’obligation de rejoindre d’autres groupes pour pouvoir défendre leurs sièges. La conséquence de tout cela serait une crise grave du FMI.

    En Suisse, l’inquiétude croît car on pense que les pays de l’UE finiront par s’entendre avec les États-Unis pour la répartition des voix et des sièges au détriment de la Confédération Helvétique. Mais, malgré cette inquiétude, la perspective est bonne du point de vue suisse ; en ce moment, le parlement helvétique doit ratifier un crédit de 17,5 milliards de dollars, accordé par la Banque Nationale suisse au FMI. Les politiciens suisses sont d’une autre trempe que leurs homologues allemands : ils défendent leurs intérêts nationaux de manière conséquente et exigent d’ores et déjà de faire dépendre l’octroi de ce crédit du maintien du siège suisse dans le directoire exécutif du FMI.

    ► article paru dans DNZ n°35/2010.


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