• Démocratie

    Nordic-ThingAux sources de la démocratie scandinave…

    [Ci-contre : Thing nordique par Olle Hjortzberg, 1932]

    • Analyse : Olof PETERSSON, Die politischen Systeme Nordeuropas : Eine Einführung, Nomos Verlagsgesellschaft, Baden-Baden, 1989, 155 p.

    L'objet de ce livre d'Olof Petersson : contribuer aux discussions politologiques sur la notion de démocratie en analysant le phénomène concret de la très ancienne démocratie scandinave, depuis les temps héroïques du Thing (assemblée populaire dans la Scandinavie antique) jusqu'aux parlements modernes. Ces assemblées sont des embryons de véritable démocratie directe, même si, au fil des temps, ce pouvoir populaire direct à été graduellement confisqué par les possédants. L'histoire scandinave connaît cette particularité que le dialogue entre gouvernants et gouvernés y a toujours été assez direct, contrairement à l'Europe médiévale, administrée selon les principes du féodalisme. Ce dernier a pu s'imposer au Danemark mais est resté marginal en Suède.

    Dans ce pays, le principe atavique du Thing se transforme au XVe siècle en une assemblée des quatre états (noblesse, clergé, bourgeoisie et paysannat). La présence du paysannat, constance incontournable de toutes les sociétés, est un fait quasi unique en Europe à l'époque. Au XVIIe, alors que le Danemark se dote d'un gouvernement monarchique absolu qui suscite d'intéressantes spéculations chez Bodin et Hobbes, la Suède opte pour un absolutisme très modéré où le Roi et le Paysannat sont unis contre les tentatives de la noblesse d'accroître son pouvoir, système et praxis politiques qui feront l'admiration enthousiaste de Ernst Moritz Arndt, père des nationalismes allemand et flamand. Au XVIIIe siècle, la Suède traverse une période de liberté (introduite par la constitution de 1719-20) suivie d'un renforcement du pouvoir royal (constitution de 1772) et d'une application imparfaite de la séparation des pouvoirs tout au long du XIXe.

    En 1849, le Danemark passe du jour au lendemain de l'absolutisme à une démocratie radicale, avec suffrage quasi universel pour les hommes. La Norvège, en 1814, à la veille de l'Union avec la Suède, se taille une constitution avec la séparation des pouvoirs où le droit de vote est accordé à tous les paysans indépendamment de la taille de leur propriété. La Finlande conserve sous l'hégémonie russe la constitution suédoise de 1772 ; en 1906, la répartition en quatre états est abrogée et une représentation maximale — la plus étendue d'Europe — est adoptée englobant les ouvriers agricoles et industriels. Si les techniques de gouvernement populaire et démocratique étaient meilleures, plus mûries par les siècles, en Scandinavie que partout ailleurs dans le monde, restait toutefois à l'avant-plan le problème de la représentation des classes sociales nouvelles, que la complexification des sociétés suscitait : ce problème, la constitution finlandaise le résolvait en 1906, déclenchant un processus en chaîne dans tous les autres pays nordiques.

    Cette longue tradition démocratique a permis aux Scandinaves d'élaborer des techniques de gouvernement optimales, dignes d'être copiés, à la condition que l'on se souvienne toujours du contexte particulier dans lequel elles sont nées. Ces techniques, on pourrait, chez nous, en mobiliser l'esprit et la forme dans le combat pour le référendum d'initiative populaire et l’institutionnalisation de garde-fou contre l'emprise étouffante des administrations et contre les nominations de fonctionnaires et de magistrats sur base d'appartenance aux partis en place. Olof Petersson décrit avec la minutie du juriste et du politologue la genèse et le fonctionnement d'une série d'institutions et de techniques de gouvernement scandinaves : le référendum populaire, l'auto-administration aux échelons locaux (communaux), l'administration des minorités ethniques (Allemands au Danemark, Sami en Norvège, etc.), etc.

    L'auto-administration des échelons locaux/communaux constitue certainement la caractéristique la plus originale des pays scandinaves. La démocratie est ancrée solidement à ce niveau géographique-là du pays depuis près d'un millénaire. L'ensemble des réflexes sociaux qui sous-tendent les autonomies locales scandinaves est sans nul doute ce qui doit mobiliser nos attentions et nos volontés. Le souci de faire participer à la chose politique le maximum de citoyens, depuis l'institution des quatre états au XVe siècle suédois jusqu'aux initiatives de citoyens contemporaines, constitue également une façon d'échapper à la confiscation du pouvoir par des cliques sectaires, religieuses, politiciennes ou concussionnaires. Olof Petersson avertit bien le public allemand, auquel cette édition s'adresse : la confiscation de la démocratie au profit de structures bureaucratisés, au départ portées par des citoyens volontaires qui exerçaient une fonction publique à côté de leur profession concrète, est une réalité dangereuse en Scandinavie. C'est cette bureaucratisation réelle qu'ont voulu dénoncée les critiques acerbes du modèle suédois, comme le Britannique conservateur Roland Huntford vers 1975. Pour Petersson, il n'y a pas de modèle scandinave qui soit une panacée. Il y a une double tradition de participation politique active des citoyens à la chose publique et de représentativité aussi complète que possible. Participation et représentativité qui ont connu des hauts et des bas. Raison pour laquelle ceux qui s'y intéressent doivent rester des citoyens vigilants. Une vigilance qui n'est possible que dans une société homogène, conscient de son histoire événementielle et institutionnelle.

    ► Robert Steuckers, Vouloir n°65/67, 1990.

     

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    DémocratieNationalisme et démocratie au XIXe siècle

    [Ci-contre : Barricade, rue de Soufflot, proche du Panthéon, peinture d'Horace Vernet, 1848. Les révolutions de 1848, survenues partout en Europe, ont toutes été portées par une double volonté : créer une nation solidaire et volontaire, et instaurer une démocratie participative et représentative. Nationalisme et démocratie sont donc complémentaires au départ]

    Pour la plupart de nos contemporains, les notions de nationalisme et de démocratie sont antinomiques. Pour les adeptes de l’École maurrassienne, le nationalisme intégral est l’idéologie anti-démocratique par excellence. Historiquement, les grands phénomènes politiques que furent le “national-socialisme” en Allemagne, le “fascisme” sous son aspect italien, espagnol ou portugais (nous retenons la notion de “fascisme” sous sa forme générique commune), ainsi que tous les mouvements qui se réclamèrent d’une idéologie “fasciste” dans l’entre-deux-guerres sont des mouvements anti-démocratiques. A contrario, les “démocrates” de toutes tendances (libéraux, socialistes, etc.) sont persuadés que l’idée nationaliste est essentiellement antidémocrate.

    La question qui se pose est alors la suivante : le nationalisme n’est-il pas au fond une excroissance de l’idéal démocratique ? Autrement dit, la matrice des nationalismes ne réside-t-elle pas dans la naissance du grand mouvement démocratique issu de la Révolution Française ? Et du concept démocratique des nationalités qui, au XIXe siècle, a modifié le visage politique de l’Europe ? Avant de répondre à cette question, il est nécessaire de s’arrêter sur les concepts utilisés.

    Masses, démocratie et consensus

    Dans sa définition habituelle, la “démocratie” est l’idée selon laquelle la légitimité du pouvoir réside dans la volonté populaire. Cette légitimité serait donc le résultat. d’un consensus général, qui se traduirait par la légalité démocratique. Par légalité, on peut entendre l’ensemble des techniques qui réaliserait cette adéquation de la volonté populaire et de ses représentants. Le pouvoir, en tant qu’instance de direction, se fait légitimer par une approbation de la masse que la technique élective permettrait de traduire dans les faits. Les phénomènes de démocraties électives sont donc considérés comme les seuls représentatifs de l’idée démocratique.

    Au sens propre du terme, la démocratie apparaît plus comme une introduction directe de la masse dans le domaine du politique que comme une idéologie de la représentation. Cette mobilisation des peuples, en tant que sujets du politique, la Révolution française a été la première à la réaliser sur le plan historique, en impliquant le peuple dans un système de conscription générale.

    L’idée démocratique plébéienne que nous venons de voir n’est pas la seule réalisation que l’on peut retenir. L’idéologie démocratique anglo-saxonne, qui a inspiré de nombreux philosophes continentaux (Montesquieu, Tocqueville), a donné naissance à une forme de démocratie dite représentative. Si la démocratie française de 1789 a hérité d’une partie des concepts anglo-saxons, seules la Grande-Bretagne et les États-Unis ont véritablement incarné la “démocratie représentative” historique. Enfin, les démocraties populaires du monde socialiste et, plus largement, du Tiers-Monde ont découvert une nouvelle manière de régime démocratique, fondée sur le parti unique et l’État autoritaire. Mais au-delà de tous ces avatars de la démocratie, il nous semble que deux idées fondent la forme démocratique du pouvoir : l’idée du peuple ; l’idée qu’il existe un rapport direct entre celui-ci et le pouvoir.

    Le peuple

    A.

    Le peuple : on peut retenir dans l’histoire des idées deux notions essentielles du peuple: une approche quantitative / statique, une approche métaphysique/historique.

    L’approche quantitative / statique : point de vue horizontal, cette première approche considère le peuple sous sa forme arithmétique. Le peuple est l’ensemble des individus qui, à un moment donné (notion d’instant), constitue la communauté nationale. L’addition simple des dits individus, les citoyens, permet de mesurer l’étendue et la quantité de cette notion. Les idéologues de la démocratie sont restés attachés à ce point de vue, qui justifie les valeurs “démocratiques” historiques : système électif, représentation pyramidale, division gouvernants/gouvernés, etc. L’idée essentielle reste dans la notion d’espace et non plus de temps. Le peuple est une assemblée générale d’ individualités, qui se conjuguent entre eux dans une multitude de statuts secondaires. Le plus petit commun dénominateur demeure l’état de citoyenneté qui résulte d’un statut juridique donné.

    L’approche métaphysique / historique : dans ce cas, ce qui prime ressort d’une vision métaphysique du peuple, conçu non plus comme une addition d’individus-citoyens, mais comme un “esprit collectif”, doué d’une essence et d’une substance propres. Si tué dans le temps, le peuple est aussi situé dans l’espace par accident. L’aspect temporel s’inscrit dans une vision plus qualitative du peuple. L’ensemble des générations qui, dans l’histoire, constitue une communauté de destin. Aspect religieux et charnel, qui refuse toute réduction arithmétique.

    B.

    Il en résulte alors. deux idéologies du pouvoir distinctes. Dans la première définition, le pouvoir est la résultante d’une identité des choix. En effet, c’est par le biais d’un “programme” accepté par la “majorité” des citoyens que le pouvoir justifie ses privilèges politiques de souveraineté et d’administration des personnes et des biens. C’est la démocratie représentative occidentale, où les constitutions et les textes juridiques prétendent organiser une société politique à un moment donné de l’histoire. Dans la seconde définition, le pouvoir est l’émanation historique d’une idée (idéocratie soviétique ou fasciste) ou d’une divinité nationale (la religion shintoïste au Japon et le pouvoir impérial d’Hiro-Hito au XXe siècle) ou même d’un grand mythe (le mythe du sang, par ex.).

    On peut donc diviser la notion très floue de “démocratie” en deux tendances. Une tendance “rationnelle”, où le peuple, le pouvoir et leurs rapports sont traités par l’intermédiaire de techniques politiques. Une tendance “métaphysique” où ces trois éléments sont soumis à une vision an-historique par essence et le pouvoir est le représentant d’un principe qui le dépasse.

    Le nationalisme est une idée moderne. On peut le définir comme l’idéologie qui place la nation comme pivot de l’histoire des peuples et reconnaît à ce pivot une souveraineté globale. Si on voulait situer la naissance du nationalisme, la date de 1791 pourrait être retenue. En effet, c’est la Révolution française qui, en exploitant le prosélytisme universaliste des idéaux révolutionnaires, a réveillé chez les peuples une volonté d’auto-défense et d’affirmation de soi.

    Les idéologies révolutionnaires sont, durant tout le XIXe siècle, des idéologies nationales. Elles s’appuient indifféremment sur les deux visions du peuple que nous avons analysées. Les grandes révolutions polonaise et italienne, le nationalisme allemand sont nés durant ce même XIXe siècle. Romantiques ou populaires, Jean Plumyène les a admirablement décrites (in : Les Nations Romantiques, Tome I : Le XIXe siècle, Fayard, 1979). Ce nationalisme est donc à tous points de vue une réaction collective qui implique l’action des masses sur la scène de l’histoire. Longtemps tenues à l’écart des grands évènements, les masses surgissent brutalement en tant qu’acteurs directs du politique, d’abord sous sa forme guerrière, puis sous sa forme idéo-nationale. Le nationalisme devient vite une arme formidable au service des impérialismes et des politiques de puissance des États. Le premier, Napoléon Ier utilisa le nationalisme comme sentiment-moteur d’une mobilisation du peuple. En 1870, la guerre franco-allemande est le premier conflit entre deux États-Peuples.

    L’organisation politico-militaire s’appuie sur une mobilisation de tous les citoyens. Le rôle important de l’éducation est depuis longtemps venu remplacer les simples réactions populaires. On connaît la place essentielle des instituteurs de la République française dans la diffusion du sentiment national. Le nationalisme se présente donc dès le départ comme une mobilisation universelle et sur tous les plans des citoyens autour de la défense de la patrie, conçue comme la terre des pères, et de la Nation, conçue comme l’héritage d’une civilisation commune.

    Que peut-on alors en conclure ?

    Nationalisme et modernité

    Démocratie[Ci-contre : dessin patriotique de Job tiré de l'agenda-Buvard du Bon Marché, 1917. Quatre soldats de différentes périodes historiques portent sur un bouclier un soldat de la Première Guerre mondiale, blessé mais défiant. Ce dessin est une bonne illustration de l’approche métaphysique / historique du nationalisme, privilégiant le facteur “temps”. Les générations forment une communauté de destin]

    Tout d’abord, que le nationalisme est beaucoup plus une idéologie du “peuple différencié” qu’un discours anti-démocratique. Il existe sans aucun doute une différence de nature entre une notion quantitative / statique du peuple et le discours nationaliste, mais en est-il de même avec la seconde vision ? La démocratie est aussi une idée moderne. Elle est en outre une méthode de gouvernement qui veut privilégier l’appel au peuple. Un démocrate ne peut pas imaginer un pouvoir qui ne soit pas peu ou prou l’émanation du peuple, de la volonté populaire. Même les idéologies nationalistes du XXe siècle sont attachées à respecter la volonté de la masse ou, tout au moins, à convaincre celle-ci que la politique suivie vise à améliorer son sort collectif.

    Le national-socialisme comme le fascisme ont suivi des politiques que l’on peut sans risque, après les analyses pertinentes de Raymond Martin et de David Schoenbaum, qualifier de “démocratique”. Le nationalisme apparaît beaucoup plus, sous sa forme historique, comme une technique plus efficace de gestion du destin de la nation. On ne peut sans aucun doute confondre les deux courants, mais, chronologiquement, le nationalisme doit reconnaître ses lettres de noblesse à la présence d’une forte idéologie démocratique. Si le nationalisme est une conception spécifique de la nation, si la démocratie est une définition plus juridique que politique de cette même nation, on peut sans trop de risque leur prêter une relation historique intime.

    Pourtant, on doit constater, au XXe siècle, une opposition radicale des deux courants, opposition qui a engendré des conflits très divers, des querelles territoriales franco-allemandes aux guerres coloniales des années 60.

    Les idéologues nationalistes ont souvent critiqué l’idée démocratique du peuple sous son aspect quantitatif. Mais cette critique est-elle vraiment une critique de fond ? Quoi de plus commun que la mobilisation des volontaires de l’An II et l’idée de mobilisation totale (”totale Mobilmachung”) des régimes totalitaires modernes, que cette même volonté politique de subsumer les différences sociales ou régionales dans un même culte de la communauté nationale.

    Il est vrai que la démocratie se veut une valorisation des individualismes dans un contrat collectif. Mais ce contrat, idée bourgeoise que Jean-Jacques Rousseau a développé dans sa pensée, n’est-il pas une rationalisation de l’idée plus ancienne qu’un peuple est le résultat d’une entente de tous autour d’une idée collective. Bien sûr, il y a peu de rapports entre le culte des dieux de la Cité dans l’Antiquité et le discours, plus récent, des démocrates de toutes obédiences. Mais cette différence est-elle de nature ou de degré ? Le sens de la liberté est-il moins répandu chez les citoyens d’Athènes et de Rome, chez les paysans de l’Ancien Régime en France, que dans l’Europe post-révolutionnaire ? Il est difficile de croire que le nationalisme puisse exclure le paramètre “peuple” de son schéma idéologique. Il est tout aussi difficile de ne pas constater que les démocraties modernes n’ont pas suivi une politique nationaliste. Il y a bien eu les impérialismes antagonistes des Européens, tant en Europe qu’à l’extérieur ; mais !’impérialisme est-il un nationalisme ? Cette confusion des deux notions rend malaisé une analyse sérieuse.

    Nationalisme et Démocratie ne sont pas, au fond, des discours antinomiques. L’idée nationale, bien que beaucoup plus attachée à une conception métaphysique du peuple et du pouvoir politique, n’est pas étrangère à l’idée démocratique traditionnelle. Le rôle des masses dans la politique n’est pas si lointain.

    Avec la révolution démocratique de la fin du XVIIIe siècle, apparaît un nouvel acteur : le peuple. L’histoire, jusqu’alors, et à quelques exceptions près, était l’apanage des classes “aristocratiques” : noblesse, lansquenets, etc. Le monde moderne naît avec l’apparition des grandes collectivités engagées dans l’histoire, non plus seulement comme objets, mais comme sujets de l’histoire. Les sociétés traditionnelles avaient toujours considéré le destin comme le jeu des forces divines et le pouvoir comme l’intermédiaire entre ces forces et l’homme. Comme intermédiaire, le pouvoir participait, dans ses fonctions naturelles, de ce divin : par ex., comme fonction magique et souveraine. La modernité, vaste mouvement de “désenchantement” du monde, réduit le pouvoir à une simple superstructure mécanique des forces matérielles. On peut reconnaître à Marx le mérite d’avoir dévoilé cette mutation quantitative du politique. En dénouant les fils subtils qui nouaient la fonction sacrée/souveraine et le monde divin, alors image parfaite des valeurs traditionnelles, le monde moderne a engagé le processus de matérialisation du pouvoir. Or, le seul élément réel qui pouvait sous-tendre un ordre politique se trouvait dans le peuple. Cette réduction laïque du politique devait aboutir logiquement à l’idée démocratique qui, en fournissant au pouvoir politique un substratum solide, Je préservait de la mort. Enfin, le nationalisme concluait ce procès en intervertissant les données du jeu, sans pour autant modifier le cadre de celui-ci.

    Conclusions

    Concluons. L’idée commune qui constituait notre point de départ était la suivante : les idéologies démocratiques et nationalistes se réfèrent à des valeurs antinomiques. Notre analyse semble démontrer non pas l’opposition, ni même l’identité des deux conceptions, mais tout au moins une certaine filiation des deux idées. Plus largement, démocratie et nationalisme appartiennent à la même conception du monde, quantitative et collectiviste, fondée sur un ensemble de valeurs issues de l’idéologie du Tiers-État, idéologie bourgeoise qui, dans la théorie traditionnelle des cycles, émanent de la mentalité marchande / productive. Une même démonie de la matière, une matrice commune, la modernité, rapprochent les deux conceptions.

    Notre objectif n’est pas de vouloir assimiler des mouvements qui ont eu, dans l’histoire, des rapports conflictuels. Les guerres du XXe siècle sont le résultat d’une situation de dissolution et de confusion totale des valeurs. Certains régimes ont voulu chercher à favoriser une renaissance des valeurs traditionnelles. Leur histoire montre l’erreur qu’elles ont commis : vouloir recréer à une époque de subversion absolue une société imitée des sociétés primordiales. Une seconde erreur fut ce mélange détonnant de valeurs traditionnelles et d’idées modernes. La guerre totale sanctionna cette double erreur.

    ► Ange Sampieru, Orientations n°5, 1984.

     

     

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